Une reconversion fastidieuse mais réussie

Auparavant guide nature en Baie de Somme, Camille STEIL a été contrainte de rebondir suite à un licenciement économique. Sa reconversion a été marquée par trois choses : son goût prononcé pour la nature, l’envie de travailler à son compte et l’opportunité de reprendre une clientèle avec le départ à la retraite d’un producteur près de chez elle. Pour ne pas se faire concurrence, il faut compter un héliciculteur sur un rayon de 30km.

Camille a pu bénéficier de divers accompagnements à l’installation : la Chambre d’Agriculture de la Somme, Pôle emploi, Initiative Somme ou encore Initiatives Paysannes. Elle insiste sur l’importance d’être accompagnée pour réussir son projet. Toutefois, elle regrette que sa petite taille d’exploitation lui ferme la porte à de nombreux avantages, notamment les aides PCAE. « Cela me met hors de moi », confie-t-elle. Toutefois, elle ne se laisse pas abattre et recherche d’autres soutiens financiers pour construire son projet. Elle va investir environ 60 000€ pour son projet, financé en partie par la DJA (Dotation Jeune Agriculteur.trice). Installée en 2019 juste avant le COVID, ce contexte s’est avéré porteur pour démarrer son installation. Les consommateurs s’étaient beaucoup tournés vers la vente directe pour recréer du lien en cette période de confinement.

En février 2023, elle reçoit le soutien de l’association « Des enfants et des arbres » et l’école du village pour planter des arbres dans sa microferme. L’intérêt principal est de faire de l’ombrage pendant l’été pour les escargots.


Faire des choix techniques, surmonter les pics d’activité

Les 200 000 petites bêtes à cornes élevés à l’Escargotière de la Baie de Somme sont des « Helix aspersa maxima » appelés aussi Gros gris. L’élevage d’escargots comprends deux grandes activités : la reproduction et le développement (principalement au printemps et en automne, puisque les escargots « estivent » durant la période la plus sèche). Etant seule, Camille STEIL a choisi de se focaliser sur le développement. Elle achète donc les naissains à un important producteur du Nord (59), Fabien LESAFFRE.

Ses escargots vivent dans de grandes serres en plein air, d’avril à octobre, dans un parc d’environ 800m². Ils se nourrissent du couvert végétal (colza, grande gerce, moutarde, trèfle, phacélie, sarrasin) semé spécialement pour eux, d’un complément de céréales et du carbonate de calcium. Certaines plantes semées ne sont pas appétentes pour les escargots et leurs serviront d’ombrage. Ce sont des espèces principalement mellifères, qui profitent donc aux ruches présentes sur la ferme. Le carbonate de calcium a surtout vocation a renforcer la coquille pour qu’elle arrive présentable devant le consommateur. Des abris leur permettent de se reposer et de se cacher. En septembre, elle commence le ramassage et les prépare dans son laboratoire de cuisine situé sur la ferme. Une particularité par rapport à d’autres élevages : le taux de mortalité est très élevé, d’au moins 40%. En effet, les naissains arrivent très petits et fragiles et l’escargot a un grand nombre de prédateurs : des oiseaux (merle, grive, troglodite) ainsi que des rongeurs (rats, musaraignes) et des hérissons. Les serres sont équipées d’un filet qui protège en partie contre les attaques. Cet élevage est aussi indirectement impacté par les limaces, qui s’approprient le couvert végétal.

Camille regrette que la recherche ne s’intéresse pas assez à l’héliciculture pour répondre à ses questionnements techniques « l’été, il y a un dilemme entre continuer l’irrigation pour éviter la mise en estivation de l’escargot ou au contraire l’arrêter pour stopper volontairement sa croissance pendant les jours les plus chauds et ainsi éviter le développement de la bactérie pseudomonas. Les différents producteurs partages leurs retours d’expériences mais tous ne s’accordent pas ! » d’après Camille.

L’activité s’intensifie suivant que l’on s’approche des fêtes de fin d’année. En octobre, novembre et décembre, Camille alterne entre la transformation des escargots et de nombreux marchés. Cela reste un métier qui requiert une extrême polyvalence entre production, transformation et vente. Ce rythme est notamment imposé par une DLC (Date limite de consommation) assez courte (13 jours), qui l’oblige à vendre rapidement les escargots cuisinés. Pour améliorer son autonomie, elle réfléchi à investir dans une machine sous vide qui rallongerait la DLC d’une semaine. Les ingrédients proviennent en grande partie de producteurs de la région. Au départ, Camille proposait différentes recettes mais s’est vite rendu compte que le consommateur restait attaché à la classique persillade.


Des réseaux de distribution très divers

Camille vend en direct (sur commande) sur son exploitation ainsi que sur les marchés d’Eu, du Crotoy, d’Abbeville et Ailly-le-Haut-Clocher. Elle livre également l’Esprit fermier à Glisy, Locavrac et le drive fermier à Abbeville ainsi qu’O Terra à Amiens. Ce sont de bons débouchés mais certains représentent un certain stress les années où la production vient à manquer, notamment les années sèches.


Une volonté d’accueil encore à développer

Ces 4 premières années Camille a développé son réseau et son expérience en héliciculture. Elle souhaiterait toutefois partager d’avantage sa passion auprès du grand public. Elle prends le temps pendant les périodes plus creuses d’aménager son lieu d’accueil, notamment pour les enfants.  Elle fait partie du réseau « Bienvenue à la ferme » et espère en tirer un revenu complémentaire pour au moins compenser le temps passé.

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