Une ferme qui s’inscrit profondément dans le paysage

Située à 900 m d’altitude, conduite en bio et en biodynamie, la ferme créée en 1987 par les parents de Mathis a d’abord misé sur l’élevage de vaches vosgiennes. Jonas, le frère de Mathis, reprend ensuite l’atelier pain lors de son retour sur la ferme. Plus tard, quand Mathis s’installe, un troupeau de 50 chèvres laitières alpines et savoyardes rejoint les 25 vaches laitières. La complémentarité entre les ateliers a été réfléchie et le choix des chèvres n’est pas anodin. Ces dernières entretiennent le terrain pentu, qui nécessite alors moins d’entretien mécanique. Par ailleurs, en hiver, les rejets fourragers des chèvres sont donnés aux vaches.

Sur les 85 hectares de l’exploitation, 70 hectares sont situés en zone de montagne. La fauche sur les flancs pentus est laborieuse et coûteuse, mais le fourrage récolté est de qualité supérieure. La difficulté technique vaut donc la peine d’être dépassée.

En 2010, la ferme a eu l’opportunité d’acquérir 12 hectares de plaine dans la vallée. Ces terres permettent de cultiver du fourrage, ainsi que du blé pour la fabrication du pain. « On a vraiment beaucoup de chance d’avoir ces terrains en plaine », soulève Mathis. 10 tonnes de blé par an sont destinées à la farine, dont 6 à 7 tonnes sont transformées en pain.

C’est « l’amour de la montagne qui nous relie tous sur la ferme », affirme Frantz, le père de Mathis. Depuis la création de la ferme, la famille se donne pour mission de participer à l’entretien et à l’ouverture du paysage qui les entoure. Ils essaient de remodeler le paysage d’élevage en remplaçant progressivement les forêts de sapins et les jeunes bouleaux envahissants par des prairies et des arbres fruitiers.

La volonté de créer des emplois durables sur la ferme

Pour Frantz, « c’est une fierté d’avoir une petite ferme à 900 m d’altitude qui emploie 6 personnes ». Pour parvenir à cette belle réussite, il a fallu réfléchir aux solutions pour rendre l’activité viable pour tous.

Après son BPREA, Mathis a parcouru la France pour faire le plein d’expériences agricoles. « C’est important de voyager, de voir d’autres modèles que la ferme parentale avant de s’installer ». Il s’est ainsi forgé son esprit critique qui lui permet d’apporter de nouvelles idées et de faire des choix éclairés. Il avait envie de revenir sur la ferme familiale, mais il fallait trouver un moyen pour créer un revenu supplémentaire, car les vaches laitières ne procuraient pas un revenu suffisant pour une personne de plus. Mathis a donc lancé en 2017 l’élevage de chèvres et un atelier de transformation fromagère.

Quand Jonas a lui aussi voulu revenir, la même question s’est posée. La ferme avait des terres en plaine et disposait d’un moulin Astrié pour moudre le blé en farine : Jonas a ainsi pu reprendre l’atelier pain avec succès.

En réfléchissant à la création de nouveaux ateliers sur une ferme existante, on ne repart pas de zéro. C’est un avantage si l’on construit un projet cohérent à partir d’une base déjà solide. Jonas, comme Mathis, a profité de parcelles et de matériel adaptés à leurs activités.

S’adapter aux caractéristiques et aux besoins du territoire

« Chaque choix que l’on fait doit permettre la résilience et les retours en arrière, et surtout s’adapter à ce qui existe déjà sur notre territoire ».

Le choix de la race Vosgienne s’est fait naturellement. C’est une race mixte, rustique, adaptée aux sols acides et docile. Avec le lait des vaches, la ferme produit du munster – fromage local –, des yaourts, du fromage blanc, mais aussi du Bargkass qui sert de tampon face aux variations de la production. « C’est une tomme qui se stocke et qui permet ainsi de réguler la production quand il y a un peu plus de lait ».

Choisir des productions qui se vendent facilement dans le territoire fait gagner du temps. Mais c’est important de prendre aussi en compte l’entourage paysan. Pour éviter la concurrence avec les éleveurs voisins qui faisaient déjà des fromages frais, Mathis a choisi de produire un fromage de chèvre à pâte molle original : le geisster. Partager les débouchés avec les autres paysans fait partie de l’adaptation du système au territoire. « Nous ne voulions pas empêcher ceux d’à côté de vivre ».

Bien que l’objectif soit toujours de tendre vers l’autonomie, la ferme n’est plus autonome en fourrage pour les animaux, car les besoins augmentent et la production de fourrage diminue depuis quelques années. De même, c’est un cultivateur qui s’occupe pour l’instant des travaux sur les cultures céréalières en plaine, faute d’outils adaptés. L’objectif est de maîtriser cela aussi à terme.

Gérer la valeur ajoutée : de la production à la commercialisation

La ferme mise sur la qualité de ses produits. Le munster est confectionné sans ferments, ce qui est rare aujourd’hui. Par ailleurs, en transformant le blé en farine, le moulin Astrié permet d’avoir une farine de qualité qui conserve les propriétés nutritionnelles du blé. La transformation de la farine en pain permet de dégager une grande valeur ajoutée.

Bien que les modes de commercialisation soient diversifiés, une matinée de tournée par semaine suffit pour tout livrer. Les produits de la ferme sont déposés dans des magasins de producteurs, des petits magasins de village, des affineurs, des restaurateurs, une AMAP… La commercialisation permet de la valeur ajoutée car il y a peu d’intermédiaires, que tout n’est pas livré à un seul grossiste et que les débouchés locaux sont nombreux.

S’organiser pour travailler à plusieurs

Avec 6 personnes qui travaillent sur la ferme, et les stagiaires de temps à autre, cela fait une grosse équipe ! « L’avantage d’être plusieurs, c’est de pouvoir se compléter, d’être polyvalent, de mutualiser les outils… mais il faut aussi vouloir et savoir communiquer, et avoir une bonne organisation du travail ». Dans ce sens, ils ont tous participé à la formation « Travailler à plusieurs » proposée par l’ARDEAR Grand Est en 2020.

Tous les lundis, une réunion d’équipe est programmée pour répartir les taches de la semaine et faire des choix collectivement. Quelque soit le statut (associé, salarié), tout le monde a son mot à dire dans les décisions. Il y a un ou deux référents pour chaque atelier, cependant tout le monde est polyvalent et solidaire lorsqu’il y a besoin de s’entraider.

La structuration d’une nouvelle équipe sur la ferme

En 2021, le père de Mathis part à la retraite et l’équipe de travail va se restructurer. Ils vont réfléchir ensemble à une nouvelle organisation du travail et redéfinir leur objectif commun, l’idée étant d’adapter constamment le projet agricole aux personnes qui le constitue.

Un des sujets qui occupera la nouvelle équipe est la question du temps de travail. En effet, les associés ne comptent pas leurs heures. L’objectif sera de permettre à chacun d’avoir une vie familiale, personnelle, et sociale épanouissante.

Divers projets seront à réfléchir ensemble : faire de l’estive avec une salle de traite mobile, continuer la pépinière pour replanter des arbres fruitiers dans les près de fauche pour embellir le paysage et remplacer les sapins, s’adapter au changement climatique et notamment à la sécheresse…

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