Une installation chaotique qui pousse aujourd’hui à réfléchir avant certains choix

Dominique s’est installé en 1992 sur la ferme de son beau-père qui prenait sa retraite, avec son beau-frère installé depuis 1985. Ils produisent du lait à Comté bio sur 120ha avec un quota de 312000l. Au début, Dominique ne devait travailler qu’à mi-temps, pour développer son élevage d’escargots. Il a vite vu que ce n’était pas tenable et a abandonné l’héliciculture pour s’investir totalement dans la ferme. « L’installation s’est fait précipitamment, il n’y a presque pas eu de discussion si bien que les malentendus ont plombé les relations entre associés pendant des années. C’est une fois installé, en travaillant dans la ferme que j’ai compris que cette « cathédrale » avait été mal conçu : mal orientée, les animaux au nord et le stockage au sud, avec des logettes trop courtes qui causaient de sérieuses blessures aux vaches. Les conditions de travail étaient déplorables et les résultats économiques pâtissaient d’une mortalité et d’un taux de réforme trop élevé. Finalement nous avons refait entièrement les bâtiments pour les génisses et nous avons profité de la mise aux normes pour abandonner les logettes et construire une aire paillée. Il aura fallu quinze ans pour améliorer les bâtiments, mieux loger les animaux et travailler dans de meilleures conditions. De cette expérience je retiens qu’un projet insuffisamment réfléchi se paye pendant de nombreuses années et qu’avant toute transformation il est important de bien mesurer ce que ça va modifier, en positif comme en négatif. »

Gérer au mieux la pâture pour valoriser l’herbe et diminuer les concentrés

Eleveur de montbéliardes, Dominique n’est pas simplement un producteur de lait ; c’est un paysan producteur de lait à Comté, or qui dit Comté dit qualité. Mais pour Dominique si la qualité ne fait pas bon ménage avec la surproduction, par contre cela rime bien avec rentabilité. Compte-tenu du fait que l’aliment le plus économique c’est l’herbe à la bonne saison et le foin pendant l’hiver et que justement le bon goût du Comté est lié à ses aliments, la conclusion s’impose d’elle-même : la qualité des prairies et leurs usages (pâturage et fauche) sont primordiaux dans la conduite de l’exploitation. Les bonnes années, Dominique cherche à atteindre au pâturage minimum 20kg de lait par vaches par jour sans concentré et l’hiver la ration de base 2/3 foin et 1/3 regain doit permettre une production de 14 à 15kg. Pour réaliser ses objectifs, Dominique utilise différentes techniques (pâturage au fil, alternance pâturage fauche), optimise la rotation sur les parcelles et il préconise une fauche précoce mais pas trop basse (pour faciliter la repousse) et le séchage en grange. C’est à la suite d’observations sur son troupeau et ses prairies qu’il s’est forgé des convictions dont il est toujours prêt à débattre. « Même aujourd’hui, à 55 ans, j’ai encore envie d’essayer de nouvelles choses. »

Installer un jeune pour diminuer le temps de travail

Il y a deux ans, Dominique avait songé à arrêter le GAEC pour se réinstaller seul en se lançant dans un projet de transformation laitière à la ferme. Mais finalement l’arrivée d’un troisième associé l’a incité à rester. Ce projet d’un associé supplémentaire était discuté depuis quatre ou cinq ans : « Un gros travail avec la comptable a été fait, l’idée n’est pas de s’agrandir pour installer quelqu’un mais de modifier le moins possible l’exploitation pour diminuer notre temps de travail. Je suis convaincu qu’on peut encore s’améliorer en productivité, en qualité de travail, sans forcément devoir investir matériellement ». Pour l’instant, le jeune arrivant est salarié du GAEC mais les trois paysans ont désormais pour eux deux week-ends sur trois et un jour de libre chaque semaine. Ce choix de vie satisfait aussi l’épouse de Dominique, qui apprécie un rythme de vie plus en adéquation avec le leur.

Penser sa ferme par rapport à l’ensemble du système

Militant et ancien responsable national à la Confédération Paysanne, Dominique a une conception de l’agriculture plutôt globale. Car une ferme subit aussi les évolutions du monde : prix du pétrole, pression des distributeurs ou évolution du pouvoir d’achat des consommateurs, réglementations, etc. « Nos actes ont un impact sur les autres, tant sur nos voisins que vis-à-vis d’autres pays. La Conf’ est un syndicat qui va bien au-delà des revendications corporatistes et permet aux paysans d’échanger, de se former pour sortir du seul cadre de l’exploitation. Il faut éviter de ruminer tout seul dans son coin et s’ouvrir aux autres ! »

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